Présidentielle 2017 et retraites, le programme d’Emmanuel Macron

Vers un nouveau système proposant une égalité des droits

Presidentielle 2017 Emmanuel Macron

La refonte voulue par Emmanuel Macron, passerait par une harmonisation progressive des règles qui deviendraient « les mêmes pour tous les régimes ». Elle annoncerait la « vraie fin des inégalités entre fonctionnaires et salariés du privé ».

La convergence du public et du privé selon Emmanuel Macron

Cette harmonisation ferait disparaitre les régimes spéciaux (RATP, SNCF, CNIEG, etc). Les assurés du « privé » et les indépendants cesseraient de fustiger les avantages réels comme imaginaires des fonctionnaires. Outre les âges de départ, l’harmonisation devrait aussi porter sur le mode de calcul des droits à la retraite.

Sur ce thème les disparités entre les différents régimes sont nombreuses

Le salaire de référence de la fonction publique basé sur le traitement indiciaire de fin de carrière hors primes est à comparer à celui, limité au plafond de la sécurité sociale, des 25 meilleures années des salariés du secteur privé.

Le taux plein de liquidation des retraites des fonctionnaires de 75 % semble élevé par rapport aux 50 % du privé. Mais dans une comparaison finale, il faudrait rappeler le poids des retraites complémentaires Agirc et Arrco bien plus élevé que la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP) créée depuis trop peu de temps pour apporter un supplément significatif de retraite.

Les différentes études comparatives menées sur le sujet n’arrivent pas à des conclusions définitives sur le fait que ces règles avantagent les salariés du secteur public. Mais tant que le doute demeurera, il sera difficile de faire accepter des efforts supplémentaires à ceux qui s’estiment, à tort ou à raison, défavorisés par les règles actuelles des régimes de retraite.

Un euro cotisé donne les mêmes droits

Toujours sur le principe de l’équité, Emmanuel Macron souhaite appliquer l’idée de contributivité : « un euro cotisé donne les mêmes droits quel que soit le statut » du cotisant.
Dans un régime contributif, les droits à pension sont attribués en proportion des cotisations. En France, les régimes à points sont des régimes contributifs. Ainsi, chaque assuré acquiert des points qui lui sont propres et la pension versée est proportionnelle au nombre de points acquis.

En France aujourd’hui, des régimes à points donnent des droits différents

Le régime de base et les régimes complémentaires des professions libérales, les régimes complémentaires des salariés du privé, ainsi que le régime complémentaire des indépendants sont des régimes à points.
Mais les paramètres sont différents pour chaque régime. Les taux de cotisations ne sont pas les mêmes donc à revenu égal les cotisations ne sont pas égales d’un régime à l’autre.
À titre d’exemple, les taux de cotisation retraite sont de l’ordre de 21 % dans les régimes complémentaires des salariés et de 8 % dans le régime complémentaire des indépendants cotisant au RSI.
Mais à cotisations égales les droits acquis ne sont pas non plus égaux. En 2017 pour 1 000 € cotisés auprès de son régime complémentaire, un avocat obtiendra 101 € de rente annuelle brute, un architecte 74,20 € et un salarié du privé 61,80 €.

Rendements Retraites

Rappelons que le salarié ne verse que 40 % des cotisations (les 60 % restants étant versés par l’employeur). Ses seules cotisations salariales ont donc en fait un rendement bien supérieur : 1 000 € de cotisations salariales versées lui apportant une rente de 154,50 €.

Pour qu’un euro cotisé donne les mêmes droits, les régimes à points devront adopter les mêmes paramètres… ou fusionner vers un seul et même régime. Cette fusion serait-elle acceptée par les régimes qui ont constitué des réserves leur permettant de rester à l’équilibre à l’avenir et qui assurent un bon rendement à leurs cotisants ?

Les mêmes règles pour tous

Emmanuel Macron nuance cependant son projet que ce soit au niveau de la pénibilité ou des indépendants. Il estime par exemple que le RSI connait d’importants problèmes de gestion et de délais et propose donc un guichet destiné aux indépendants au sein du régime général. Il précise que « les exonérations et les réductions de cotisations dont bénéficient les indépendants seront préservées ». Et annonce qu’ « il sera possible pour les indépendants de cotiser davantage pour bénéficier de la même couverture que les salariés ». Quant à la pénibilité, il souhaite intégrer ce critère dans son système de retraite universel tout en changeant le terme « pénibilité » qui ne lui convient pas. Il prévoit de renvoyer les modalités d’application du compte pénibilité au niveau des branches, dans un dialogue social, son application étant aujourd’hui difficile.

Le système des comptes notionnels en Suède

Parmi les autres systèmes contributifs figure le régime en comptes notionnels de la Suède auquel l’équipe d’Emmanuel Macon s’intéresse.

Le système de retraite introduit à la fin des années 1990 par la Suède est constitué de deux régimes, un régime par capitalisation et un régime en comptes notionnels.

Les cotisations de chaque actif, salarié comme indépendant, sont enregistrées pour leur valeur monétaire dans un compte notionnel. Comme dans les régimes de retraite français, ces cotisations servent à payer les pensions des retraités. Le compte notionnel enregistre la somme des cotisations versées, sans conversion en points et les revalorise. Au moment de la retraite, le montant cumulé des cotisations est reversé sous forme de rente viagère à l’assuré.

Le montant de la rente viagère dépend de son espérance de vie à la retraite. En effet, le taux de conversion du capital en rente dépend de l’âge de l’assuré au moment de la liquidation des droits et de l’espérance de vie de sa génération à cet âge.

Deux facteurs importants ont rendu plus simple la mise en place et le pilotage de ce nouveau système.

Le régime de retraite disposait de réserves financières qui autorisaient une certaine souplesse dans l’application des mécanismes correcteurs.

De plus, le système de retraite suédois formait un système unifié avant la réforme. Celle-ci a donc été appliquée de la même manière pour tous les Suédois.

Vers un nouveau système équilibré ?

Quel que soit le régime mis en place, régime à points ou compte notionnel, sa mise en place ne permettra pas de réduire le déficit existant du régime. Il aura pour objectif d’éviter les déséquilibres futurs.

Répartition oblige, les retraités actuels et futurs continueront à vivre grâce aux cotisations versées par les actifs. Si les cotisations, donc les recettes de la caisse de retraite, baissent et qu’on ne peut assurer le versement des retraites, il faudra faire baisser la valeur du point ou la rente calculée.

Refonte en même temps ou après le rééquilibrage du système de retraite

Emmanuel Macron souhaite un système équilibré dans lequel « aucune génération ne transmet de dettes à la suivante ». Mais qu’en sera-t-il du déséquilibre existant ?

Que l’harmonisation s’arrête à la convergence des règles public privé ou aille plus loin en faisant migrer l’ensemble des régimes vers un régime universel, l’idée de convergence est commune à François Fillon et à Emmanuel Macron mais ils la planifient différemment dans le temps.

Emmanuel Macron la veut progressive mais démarrant de suite alors que François Fillon semble considérer que le retour à l’équilibre des régimes de retraites est un préalable à une refonte systémique. Or selon ce dernier cet équilibre passe par un recul de l’âge de la retraite.

Quelles seront les modalités de passage

En matière de modalités de passage, il faudra choisir entre une montée en charge progressive du nouveau système ou une conversion des droits acquis de l’ancien système vers le nouveau.

Passage progressif vers le nouveau système

Lexemple passé de la Suède peut nous renseigner. La Suède a décidé en 1994 de refondre son système de retraite dont la mise en place s’est étalée sur 16 ans.

RETRAITE SUEDE COR 2009
Source : lettre du COR – 02/2009

Comme le montre le schéma, selon leur date de naissance, les assurés ont vu la part des pensions du nouveau régime augmenter. Ainsi, les retraités nés en 1938 qui prenaient leur retraite au plus tôt en 1998 ont perçu une pension dont 4/20 (20 %) était calculée selon le nouveau système. Pour chaque année de naissance suivante, la part calculée selon les règles du nouveau régime augmentait de 1/20. En respectant cette progression, les assurés nés à partir de 1954 reçoivent ainsi une pension entièrement calculée selon les règles du nouveau régime.

Transfert des droits acquis ?

Selon le nouveau système adopté, une autre solution peut être de transférer les droits acquis intégralement vers le nouveau système.

Cette situation a déjà été vécue en France avec en 1993 le transfert du régime de retraite des banques vers l’ensemble régime général, Agirc et Arrco. Un complément de retraite avait été mis en place permettant de garantir aux assurés proches de la retraite au moment du transfert, un taux de remplacement identique dans l’ancien et le nouveau système.

Plus récemment, en 2003, le régime de base des professions libérales est devenu un régime à points avec conversion des droits acquis dans l’ancien régime.

2 commentaires
  1. Une retraite ne s’obtient qu’à la fin d’une longue carrière. Parfois la retraite fait implicitement partie du contrat de travail (cas des fonctionnaires et des autres régimes spéciaux). Une éventuelle transformation profonde du système doit donc être lente et s’étaler sur une longue période de temps en rapport avec une durée de carrière. Ce qui n’interdit pas de prendre des mesures visant à rééquilibrer les comptes. Et donc l’approche Fillon était paradoxalement la plus raisonnable.

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